Alors que l’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM) travaille à l’harmonisation – voire à la mutualisation ou la privatisation – des services de transport adapté sur son territoire, une dimension essentielle semble écartée des réflexions : l’impact de ces décisions sur les usagers vivant à l’extérieur du territoire de l’ARTM, en région périphérique ou rurale.
Les services de transport adapté sont bien plus qu’un outil de déplacement : ils représentent un droit à la mobilité, et donc à la participation sociale.
Pour de nombreuses personnes en situation de handicap vivant en dehors du territoire de l’ARTM, celui-ci demeure un point de passage obligé : rendez-vous médicaux spécialisés, démarches administratives, formations, visites familiales. Or, ces déplacements reposent sur la capacité des réseaux locaux à s’arrimer à celui de la région métropolitaine. Une réforme cloisonnée ou centralisée à l’échelle de l’ARTM risque de briser cette continuité.
Peut-on accepter que des usagers vivant en région se heurtent à de nouveaux obstacles simplement parce qu’ils n’ont pas le bon code postal ?
Peut-on tolérer qu’un résident de Baie Comeau, de Québec ou de Sept-îles, n’ait plus accès aux mêmes services, aux mêmes horaires ou à la même tarification lorsqu’il entre sur le territoire de l’ARTM ? Ce serait entériner une forme de mobilité à deux vitesses.
Une telle approche serait en contradiction directe avec les politiques publiques québécoises qui prônent l’équité, la solidarité régionale et l’universalité des droits. Le transport adapté ne peut être conçu comme un service local, isolé dans des silos administratifs. Il doit être envisagé comme un maillon d’un réseau national de mobilité inclusive.
Le risque est clair : si la logique de privatisation ou de mutualisation des services dans l’ARTM se déploie sans dialogue étroit avec les régions, c’est tout l’édifice d’un transport adapté public, cohérent et humain qui vacillera. Ce sont les usagers les plus vulnérables qui paieront le prix fort : reports de rendez-vous médicaux, perte d’autonomie, isolement accru.
L’ARTM a une responsabilité historique. Elle peut choisir d’être un moteur de cohésion territoriale, ou au contraire, contribuer à l’éclatement d’un droit pourtant inscrit dans les lois et les principes fondamentaux du Québec.
Le droit à la mobilité ne doit pas s’arrêter aux frontières administratives. Il commence là où vit l’usager, et se poursuit jusqu’à sa destination.
À nous tous de veiller à ce qu’il en soit ainsi !